mercredi 19 avril 2017

Littérature

Assis face à ma bibliothèque, je réalise que chacune de nos relations humaines peut s’apparenter à notre rapport à la littérature, aux oeuvres. Sur mes étagères de la vie, on trouve les coups de coeur, les coups de foudre, les bonheurs intenses, mais fugaces, les déceptions, les totems, les chefs d’oeuvre, les grands classiques. Il y a les rencontres fortuites, mais déterminantes, les livres que l’on relit à l’envie, à l’ennui, ceux que l’on oublie et retrouve avec délectation, il y a ceux dont on ne feuillette que quelques pages, parce qu’elles contiennent l’essence même de ce qui fait le monde, ceux que l’on ne relira jamais, mais auxquels on a fait une place de choix. Il y a ceux que l’on ouvre à peu près tous les jours, ceux que l’on chérit, ceux que l’on connait par coeur, ceux qui nous déterminent. Et puis, certains de ces « livres » vous définissent, parlent de vous, vous caractérisent, vous permettent de vous comprendre. Ils sont la pierre angulaire de votre personnage, dans ce roman qu’est la vie. 

J’en suis venu à cette conclusion en analysant cette drôle d’expression «  tourner la page ». En réalisant que j’avais enfin tourné une énorme page, je prenais conscience du caractère erroné car définitif de l’acception que l’on veut bien poser sur ce qui constitue à mon sens un abus de langage. Selon toute vraisemblance, rien ne nous empêche de revenir sur ladite page, la relire, l’annoter, parcourir cet agglomérat de mots pour y trouver des réponses, se poser des questions, éprouver le regret, le chagrin, la mélancolie, la nostalgie, le plaisir, l’amour. Si notre vie était un livre, alors sa publication définitive ne peut avoir lieu qu’au jour de notre mort, car rien n’est figé. On a toujours la possibilité de réécrire notre histoire, non pas dans les faits, mais dans l’intention, dans le niveau de compréhension ; et c’est bien là que se trouve la raison même de mon activité de thérapeute, explorer le passé pour en comprendre le présent, notre réalité, notre être, notre humanité. Chacun de nous porte en substance la vérité, sa vérité. 

Alors je vous contemple, vous, ouvrages sublimes qui composez ma bibliothèque de vie et voici les petits bijoux que l’on y trouve :
Mon Adeline serait L’alchimiste de Paolo Coelho, un de mes ouvrages préférés parce qu’il porte en lui la capacité de vous influencer, vous guider vers une vie meilleure.
Pierrick constitue la beauté poétique Du Spleen et Idéal de Baudelaire, cette partie des Fleurs du Mal qui évolue au coeur de paysages sublimes et mélancoliques.
Fred serait Le meilleur des mondes d’Aldous Huxley parce qu’il renferme la vérité de ce monde. 
CC serait à coup sur La recherche du temps perdu de Marcel Proust, un chef d’oeuvre accessible à une poignée d’initiés. 
Virginie serait La couleur des sentiments, mon livre préféré, parce que j’ai beau l’avoir lu cent fois (et ça n’est pas fini) le connaître par coeur, il possède toujours la capacité de m’émerveiller, me faire pleurer, me révéler des réalités, il parle vrai. 
Mag serait Le petit nuage, un ouvrage écrit par sa maman, illustré par ses enfants, la représentation parfaite de ce qu’elle est. 
Candice serait Roméo et Juliette, un chef d’oeuvre de la littérature classique, comme une peinture, cette Vénus de Botticelli que l’on a tous aimé et que peu ont véritablement pris le temps de contempler, admirer, pour en comprendre les secrets. 
JP serait une des aventures de Tintin, On a marché sur la lune, parce qu’il explore le monde avec la finesse du reporter et la folie du capitaine Haddock, ou Cock en stock…
Ilham serait La condition Humaine de Malraux, parce qu’elle a la certitude que c’est la fraternité qui peut unir les différences.
Nadège serait Stupeur et Tremblement d’Amélie Nothomb, un personnage hors-norme dans un univers de culture rigide. 
Cathy serait Jammin de Bob Marley, parce qu’elle a tout compris et chante la vie et qu’une bonne bibliothèque se doit de renfermer quelques chansons dont les textes sont de véritables poèmes.
David & David seraient le spectacle Ils s’aiment de Laroque et Palmade, parce qu’écrit par Muriel Robin, il est touchant, drôle, plein de peps et tellement vrai.  
Enfin, Alexandre serait Le Petit Prince de St Exupéry, cet enfant qui vous ouvre aux merveilles de ce monde et à qui j’ai dédié mon mouton. 
C’est en réalisant que j’avais tourné la page que j’ai réalisé que l’on ne la tournait jamais complètement, tout simplement parce qu’elle est déterminante. Me verrai-je contraint de ne jamais plus relire Les Fleurs du Mal ? 

Quant à moi, je crois que je suis un mix entre Les Confessions de Jean-Jacques Rousseau et Comment pratiquer le bouddhisme du Dalaï Lama, coincé dans une folie maîtrisée, entre romantisme romanesque et recherche de vérité sereine.