samedi 26 mars 2016

Trente trois

Voilà, c’est officiel, 33 se termine et je crois pouvoir admettre sans trop de difficulté que cette année aura été la plus marquante de ma courte histoire. Toutes les émotions d’une vie condensées en cette année christique qui demeurera comme un totem au coeur de mon parcours. 

J’ai démarré mes 33 ans, donc officiellement ma 34ème année, en affirmant enfin ma véritable vocation, en réalisant que c’est dans le bordel qui se joue entre mes deux oreilles que se situe mon talent et qu’il suffisait tout bonnement de le montrer. Il y a donc tout juste un an, je vivais dans le sud, j’étais amoureux et je débutais ce qui allait constituer ma plus belle réalisation. Trois mois d’écriture intensive m’auront permis d’accoucher de mon premier roman que j’ai voulu comme l’étendard de mon optimisme retrouvé. Moi qui ai fait 12 ans de dépression, qui aurait pu m’imaginer écrivant La Croix du Mouton ? Pas moi, c’est certain ! Aujourd’hui je n’aspire plus qu’à une chose : écrire, écrire toujours et encore, aller chercher ce qui se cache tout au fond, dans les profondeurs abyssales de mon être complexe et torturé. 
J’ai ainsi connu l’exaltation de la révélation à soi-même d’une incroyable vérité, puis l’angoisse envoutante, dévorante, ravageuse de l’exposition publique de mon oeuvre et enfin la vague déferlante de témoignages tous plus perturbants les uns que les autres. Parce que les gens ont pleuré et que je ne l’avais pas même envisagé, parce que les gens m’ont fait pleurer et que je ne l’avais pas plus imaginé, parce que la passion qui dévore mais ne peut se vivre en permanence rend fou, parce que la réalité nous rattrape et qu’il faut, ma foi, se résigner; pour toutes ces raisons, ce livre aura été un catalyseur d’émotions. 
Il y a encore quelques jours, un nouveau personnage qui côtoie désormais mon chaotique passage sur cette orange bleue, à propos du livre me disait « il te survivra et c’est la trace qu’on laisse après notre mort qui nous rend éternel », c’était la St Patrick, j’étais rue St Jean à Lyon, une Guinness à la main et j’ai chialé… Et comme me le disait cette amie si chère à ma coeur, Candice « après ça tu peux mourir » bon et bien je crois que la boucle est bouclée. 
J’ai souvent envié les artistes qui montent sur scène et s’en trouvent acclamés, cette décharge surréaliste d’affection qui vous submerge. Je crois qu’à ma petite échelle c’est ce que j’ai vécu avec mes quelques phrases couchées sur le papier. Je crois que plus que jamais je vis pour ces coups d’adrénaline, pour la plaisante solitude de l’écriture, ce silencieux face à face avec soi qui ne trompe pas, pour les échanges, ces ressentis, ces émotions partagées qui agissent comme un miroir de nos âmes, lorsque nos inconscients se comprennent par l’intermédiaire de ma prose. Quelle sensation… Et puis ce désespoir, ce désespoir de retourner à la vie normale, cette vie normale que j’ai tant de mal à m’approprier, que je rejette, exècre, déplore, ne comprends pas. J’ai tant d’admiration pour ceux qui travaillent, assument leurs responsabilités, je m’en sens tellement incapable, comme si ma vie n’était pas là. 
Et puis bien sûr, comment ne pas vous parler d’Alexandre, de cette histoire d’amour si belle qui a chamboulé toutes mes certitudes sur la vie, le couple. Je ne pensais pas pouvoir vivre cela, moi qui n’ai connu que la solitude et la déception. Je trouvais enfin quelqu’un qui me bouleverse, dans tous les sens du terme. Avec lui j’ai découvert une furieuse envie de vivre heureux, de mener une quête sans relâche vers le bonheur. J’ai abandonné mon aura de tristesse pour laisser place à une gaieté dont je me pensais dépourvu. Et puis, lorsque la mélancolie s’installe de nouveau, vient alors le temps de rependre la quête du bonheur, mais seul. Et parce que la vie ne m’a pas seulement offert avec lui un compagnon, mais également un meilleur ami, plus que jamais il me soutient et je l’accompagne. Le véritable amour a ceci d’extraordinaire qu’il transcende toutes les barrières que l’on s’est fixées. 

Alors voilà, je termine donc cette année seul, à Lyon à vendre des citrons et je reste convaincu qu’il s’agit bien là de la place à laquelle je dois être aujourd’hui., parce qu'en observant dans le rétroviseur de mon existence, je constate que la route est particulièrement défoncée, mais que le paysage autour est véritablement sublime.