jeudi 29 septembre 2016

Que s’est-il passé ?


Je ferme les yeux un instant, un tout petit instant et en les rouvrant voici ce que je constate. 

Je vis dans un appartement de Canut au coeur du 1er arrondissement de Lyon, dans la rue des Capucins, probablement l’une des plus vivantes de la ville. Un magnifique parquet en pointe de hongrie, un plafond à la française à plus de 3m50 de haut, des pierres apparentes, me rappellent le passé bourgeois de la cité. J’enfile mon mala tibétain sur le poignet, ma bague bouddhiste sur le majeur, une petite caresse sur la tête de Rhéia, ma chatte que j’ai affublée d’un nom de titanide et me voilà dehors. 
Je descends et traverse la traboule qui relie mon immeuble à la Montée de la Grande Côte. J’emprunte cette voie piétonne, passe devant le cabinet de mon ostéo « le corps et l’être »,  pour aller faire quelques emplettes dans mon magasin Bio préféré, dans le petit village de la Croix-Rousse ! Des fruits et légumes locaux, de saisons, des graines à ne plus savoir où donner de la tête, du lait d’amande, un peu de quinoa et le tour est joué. Je suis devenu accroc au tofu mariné…
De retour à la maison, je n’allume pas la télé puisque je n’en possède pas, mais connecte mon Macbook Air à internet et me voici écoutant des chants iraniens, tout en découpant mon chou chinois. L’après-midi sera studieuse. J’alterne entre mes traités de psychologie, le Monde des religions et Stéphane Zweig, ou peut-être Edgar A. Poe, je ne sais pas encore. La soirée s’annoncera, quant à elle épique, puisqu’elle se déroulera dans mon petit bar à vin caviste bio préféré au serveur libanais déjanté, en compagnie de ma collègue tout aussi folle. Je rentrerai me mettre au lit avec mon gros pavé sur la liberté d’être et m’endormirai en songeant qu’il serait peut-être temps d’entamer l’écriture de mon second roman. 

Mais soudain je réalise l’effroi, l’horreur, la catastrophe… Que m’est-il arrivé ? Bio, quinoa, titanide, macbook air, tofu ??? Je suis devenu un putain de bobo, l’archétype même du bourgeois bohème, qui n’a de bourgeois et de bohème que les stéréotypes. Sainte Lana Del Rey priez pour nous ! 

Quelqu’un m’a récemment fait remarquer que j’avais effectivement tout un tas de petites manies qui relèvent du boboïsme et je veux bien le croire, mais dans la mesure où sa définition même du boboïsme vient en opposition à celle du catholicisme et rien d’autre, j’ai un peu de difficulté avec l’acception brute du terme. Parce que j’ai beau retourné ça dans ma tête, dans tous les sens, cet archétype de vie que je mène s’est construit au fur et à mesure de mes pérégrinations. Je n’ai pas choisi de me rapprocher d’une quelconque secte new âge et je ne me définis pas en opposition à ce que je vois, mais bien avec la liberté narcissique qui me caractérise. 

Il est ô combien difficile de se définir et se trouver quand chacun décide de vous affubler d’une étiquette qui l’aide à vous situer et donc par extension, savoir s’il peut vous aimer. Parce qu’au fond, bobo, homo, catho, arabe, quel que soit les qualificatifs que l’on use pour vous définir, tous sont valables, mais aucun n’est valide, car de par notre individualité nous sommes tous différents, donc ne pouvant, par essence être réduit à un adjectif porteur d’un sens général et commun. Cela est d’autant plus vrai que chacun, avec toute sa subjectivité, attribue, consciemment ou pas d’ailleurs, une connotation à tous ces mots, avec les conséquences positives ou négatives que cela implique.

Alors effectivement, j’ai une vie de bobo homo, mais cela ne me définit en rien. Ce ne sont que des aspects de mon existence qui offrent aux autres le loisir illusoire de se laisser le choix de m’aimer ou non. 

Et puis tiens, finalement je vais plutôt aller faire les bouquinistes et siroter un smoothie à la bergamote !